jeudi 20 février 2014

LA FEMME QUI MARCHE DANS HAZMIEH

Photo Josyane Boulos

Je la croise tous les jours. A n’importe quelle heure. Par n’importe quel climat. Que je sorte de chez moi, que je revienne chez moi, que j’aille faire des courses.

Moi au volant, elle à pied.

Inlassablement elle marche. Depuis des années elle arpente les rues avec sa canne à la main d’un pas énergique, des jambes élancées à rendre jaloux n’importe quel top modèle. Parfois elle fait les poubelles. Ce doit être sa pause avant de reprendre sa marche.

Je n’ai jamais voulu l’arrêter pour lui demander qui elle est ? D’où elle venait ? Et pourquoi elle marchait autant ? Je sens que ce serait une intrusion à sa liberté. A son vagabondage sans but.

Quand je la vois marcher les yeux dans le vague, slalomant entre les trous et les voitures mal garées, ignorant les klaxons et la pollution, j’imagine qu’elle élimine dans sa tête le béton, l’asphalte, les immeubles, la ferraille, le bruit et qu’elle les remplace tous les jours selon son humeur, par des paysages sereins, des montagnes enneigées, des forêts luxuriantes, des jardins fleuris, des plages au sable blanc, des steppes arides et des déserts torrides.

Je marche seul
Dans les rues qui se donnent
Et la nuit me pardonne, je marche seul
En oubliant les heures,
Je marche seul
Sans témoin, sans personne
Que mes pas qui résonnent, je marche seul
Acteur et voyeur
 (Jean-Jacques Goldman)

Inlassablement elle voyage.

Loin de nous, loin de tout. Loin du web, loin du cellulaire, loin de la télé, loin des médias, loin des barbus et des tondus.

Libre.


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