mardi 15 octobre 2024

Journal de guerre 15-10-2024



(AI translation below) 

Donc si j’ai bien compris, nous crevons comme des rats pour que :
Kamala ait plus de chances d'être élue,
Bibi évite la prison et
l’Iran renégocie avec les USA.
Elle est pas belle la vie?

Il y a ces nuits où l’on ne s’endort pas, mais plutôt, on s’effondre sous le poids de l’épuisement. Ce ne sont pas des nuits de repos, mais des moments volés au chaos, où le sommeil est une fuite temporaire d’une réalité trop lourde à porter. Puis vient le matin, et avec lui, cette brutale confrontation : le réveil ne nous libère pas, il nous ramène face à la guerre – une guerre qui s'ajoute aux traumatismes laissés par la guerre civile, par l'explosion du 4 août, et par la lente agonie des crises économiques et sociales.

Et pourtant, dans ce tourbillon de douleurs, les véritables criminels prospèrent. Les mafieux au pouvoir, indifférents aux souffrances du peuple, continuent à protéger leur confort et à renforcer leurs positions. Pendant que les factions politiques maintiennent des dissensions intercommunautaires, jouant sur nos divisions pour mieux régner, l’appel à l’unité sous un seul drapeau est inexistant. Ils nourrissent nos peurs au lieu de les apaiser.

Le Hezbollah, de son côté, s'accroche à des récits de grandeur révolue. Ils se présentent encore comme puissants, alors que leur propre communauté, abandonnée, souffre en silence. Ils refusent obstinément de séparer les conflits du Liban de ceux de Gaza, alors qu’aucun Libanais ne veut cette guerre. Nous sommes malmenés, nous, le peuple libanais, comme un fétu de paille dans la tempête, ballottés entre des forces qui nous dépassent.

Mais aujourd’hui, il y a eu une parenthèse de bonheur, une heure volée à l’horreur de notre quotidien. Les petits réfugiés, hébergés avec leurs familles chez les Jésuites, ont été invités à un spectacle de clowns au théâtre Le Monnot. Pour un instant, les rires des enfants ont couvert le bruit des tragédies, et pendant une heure, l’insouciance a remplacé l’angoisse. Parce qu’au milieu de tout ce désespoir, il y a ces moments de lumière, où l’humanité reprend le dessus, ne serait-ce que pour une heure.

Josyane Boulos 

------

Here’s the text translated into English:

So if I understand correctly, we’re dying like rats so that:

- Kamala has more chance to be elected,

- Bibi avoids prison, and

- Iran renegotiates with the USA.

Isn’t life beautiful?


There are nights when we don’t fall asleep, but rather collapse under the weight of exhaustion. These aren’t nights of rest, but moments stolen from chaos, where sleep is a temporary escape from a reality too heavy to bear. Then comes the morning, and with it, a brutal confrontation: waking up doesn’t liberate us, it drags us back into the war—a war that piles onto the trauma left by the civil war, by the explosion of August 4th, and by the slow agony of economic and social crises.

And yet, in this whirlwind of pain, the real criminals thrive. The mafiosos in power, indifferent to the suffering of the people, continue to protect their comfort and strengthen their positions. Meanwhile, political factions maintain intercommunal divisions, playing on our fractures to rule over us more easily, while the call for unity under a single flag is nowhere to be found. They feed our fears instead of calming them.

Hezbollah, for its part, clings to stories of bygone glory. They still present themselves as powerful, even though their own community, abandoned, suffers in silence. They stubbornly refuse to separate Lebanon’s conflicts from those in Gaza, even though no Lebanese wants this war. We, the Lebanese people, are battered like a straw in a storm, tossed between forces beyond our control.

But today, there was a brief moment of happiness, a stolen hour away from the horrors of our daily life. The little refugees, sheltered with their families by the Jesuits, were invited to a clown show at Le Monnot Theatre. For an instant, the children’s laughter drowned out the noise of the tragedies, and for an hour, innocence replaced fear. Because in the midst of all this despair, there are these moments of light, when humanity prevails, if only for an hour.


Josyane Boulos


vendredi 11 octobre 2024

Le Libanais Typique - Journal de Guerre 11-10-24

 




(AI English translation below) 

11-10-24 

Envie d'être plus légère ce soir... Malgré tout.

On pourrait penser qu’être typiquement libanais, c’est savoir préparer le taboulé avec le persil plat, conduire comme un taré, dire Yalla ! à tout bout de champ ou se disputer qui va payer l’addition au resto. Ce n’est pas du tout ça ! Être typiquement libanais c’est :

  • Recevoir une vidéo/ ou un article d’un journal étranger parlant du Liban et l’envoyer immédiatement à tous ses contacts Whatsapp qui l’enverront à tous leurs contacts. Tu le recevras donc 15 fois. Nous sommes, il ne faut pas l’oublier, le nombril du monde.
  • Avoir plusieurs UPS à la maison : un pour l’ordi, un pour la Wifi et un pour la PlayStation/XBox des gosses (pour les étrangers go Google UPS)
  • Avoir un répertoire d’insultes très varié qui s’adresse à Satanyahu et son sbire Avichie Azrael, à toutes les instances de l’état qui se réveillent un peu trop tard et à toutes les milices qui nous ont fait arriver ici pour la gloire d’autres drapeaux.
  • Te hérisser et entrer dans une rage folle quand tu apprends que le voisin du sud veut s’approprier le hommos et la manouché.
  • Faire un doigt d’honneur au drone qui sans cesse ronronne au-dessus de nos têtes.
  • Défendre un « zaïm » qui te suce le sang. Tu l’applaudis par réflexe probablement. J’espère pour toi.
  • Être Libanais c’est te hérisser quand tu as lu la phrase du haut, parce que tu es encore un « zaïmien » mais le tien c’est le bon, il ne faut pas mélanger les serviettes et les torchons, Je ne sais pas par quel tour de baguette magique tu as oublié toutes les horreurs qu'il a commises pendant la guerre. (Je parie que maintenant, tu penses au zaïm de l'autre camp et que tu vas arrêter de lire ce texte, car tu n'arrives pas à prendre du recul sur la situation.)
  • Dormir sous les bombes et le lendemain aller au travail, à l’école, à la plage. Tu mettras sur les réseaux les photos des bombardements mais pas de la plage. Faut pas exagérer quand même !
  • Apprendre à ses enfants dès leur plus jeune âge que quand ils seront grands, ils vont aller vivre ailleurs en sécurité. Parce qu’ici rien n’est stable, tout peut flamber n’importe quand.
  • Inventer le mot « fresh dollars »
  • C’est y croire encore. Se battre encore pour sauver les restes. Pourquoi ? Je ne sais pas. Mais ce n’est sûrement pas pour l’odeur de la manouché, du jasmin et le goût des amandes vertes. Peut-être parce qu’abandonner est une forme de défaite.
  • C’est faire partie d’une petite communauté de 4 millions de personnes sur un petit territoire de 10452 km2 et être plus désunis et intolérants que la Terre entière.
  • Ce qui ne t’empêche pas de faire preuve d’un élan de solidarité fédérateur pour aider ton prochain.
  • Et surtout être typiquement libanais c’est vivre dans la sous-merde et appeler ça « résilience. »

Josyane Boulos 

----- 

10-11-24 

Feeling like being lighter tonight… Despite everything.

One might think that being typically Lebanese means knowing how to prepare tabbouleh with flat-leaf parsley, driving like a maniac, saying “Yalla!” at every opportunity, or arguing over who will pay the restaurant bill. That’s not it at all! Being typically Lebanese means:


  • Receiving a video or an article from a foreign newspaper about Lebanon and immediately sending it to all your WhatsApp contacts, who will then forward it to all their contacts. You’ll end up receiving it 15 times. We are, after all, the center of the universe.
  • Having several UPS units at home: one for the computer, one for the WiFi, and one for the kids' PlayStation/Xbox (for foreigners, go Google UPS).
  • Having a very colorful repertoire of insults directed at Satanyahu and his henchman Avichie Azrael, at all state authorities who wake up a bit too late, and at all the militias that got us here for the glory of other flags.
  • Getting outraged and entering a blind rage when you hear that the neighbor to the south wants to claim hummus and manousheh as their own.
  • Flipping the bird at the drone constantly buzzing above our heads.
  • Defending a "zaim" who’s sucking your blood. You probably applaud him out of reflex. I hope so, for your sake.
  • Being Lebanese means getting furious when you read the above sentence, because you’re still a "zaim-ist" but yours is the good one, of course. We mustn't mix napkins and rags. I don't know by what magic trick you've forgotten all the horrors he committed during the war. (I bet now you're thinking of the zaim from the other side and will stop reading this text because you can't take a step back from the situation.)
  • Sleeping under bombs and going to work, school, or the beach the next day. You'll post pictures of the bombings on social media, but not of the beach. We have to maintain some decency!
  • Teaching your kids from a young age that when they grow up, they’ll go live elsewhere, somewhere safe. Because here, nothing is stable, everything can blow up at any moment.
  • Inventing the term “fresh dollars.”
  • It’s still believing. Still fighting to save what’s left. Why? I don’t know. But it's definitely not for the smell of manousheh, jasmine, and the taste of green almonds. Maybe because giving up is a form of defeat.
  • It’s being part of a small community of 4 million people on a small territory of 10,452 km² and being more divided and intolerant than the rest of the world.
  • Which doesn’t stop you from showing a wave of unifying solidarity to help your fellow citizen.
  • And above all, being typically Lebanese means living in the worst conditions and calling it "resilience."

Josyane Boulos 




jeudi 10 octobre 2024

Journal de Guerre 10-10-24

 

(AI english translation below) 

10-10-24 

Israel vient de bombarder le coeur de Beyrouth. Basta et Ras el Nabeh. A deux minutes du théâtre Monnot. Mon lieu de travail. Un quartier très peuplé. Il semble qu'un immeuble entier s'est effondré. Sans un ordre d'évacuation préalable de Avichay Adraee.  Je pense avoir compris leur stratégie : Quand il y a un ordre, ils bombardent un dépôt de munitions. Quand ils ne le font pas, ils ciblent quelqu'un de précis. 

Aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de me demander : combien de temps cette guerre va-t-elle encore durer ?  Certains disent quelques mois, d'autres parlent de plusieurs années. Une guerre civile ? Je n’y crois pas vraiment. Les Libanais n’en ont ni l’envie, ni l’énergie. Pourtant, l’ambiance est tendue, et cette tension prolongée pourrait bien dégénérer... Il faut rester tellement vigilant. Travailler pour rester unis. Oublier les haines pour se rapprocher de l'autre.  Je pense souvent à ce qu’il faudrait faire pour éviter ça. Peut-être qu’il est temps de reconnaître que personne n’a gagné dans nos guerres passées. On est tous perdants. Il nous faut un nouveau départ, un vrai, avec un système politique fonctionnel et un État digne de ce nom. Mais en parler est tellement plus simple que de le réaliser.

Et Israël ? C’est étrange, malgré toutes les violations du droit international, personne ne semble réagir. Je me dis que l’Europe est encore marquée par la Shoah et que, pour l’Occident, Israël reste un allié indispensable dans cette région instable. En plus, ils ont créé des réseaux d’influence tellement forts qu’ils sont intouchables. Il y avait sur Facebook il y deux jours l'image d'un graffiti à Berlin qui disait " Arrêtez de faire porter à la Palestine, la culpabilité de l'Allemagne." 

Au Liban, c’est la confusion. On évoque les résolutions 1701 et 1559, mais c’est loin d’être suffisant. Notre classe politique est complètement dépassée par tout ça, consciente de ses limites. La présidentielle est toujours bloquée, et même avec la pression des États-Unis, j’ai du mal à voir comment ça va se débloquer.

Les pays arabes, eux, restent silencieux. Ça ne m’étonne pas vraiment. Tant qu’Israël s’en prend principalement au Hezbollah, ils ne bougeront pas. Le Hezbollah, d’ailleurs, a modifié son discours, il ne lie plus la fin des combats au Liban à ce qui se passe à Gaza, mais honnêtement, ça ne change rien pour le moment. 

Tout repose sur Israël?  Est-ce eux uniquement qui décideront quand cette guerre prendra fin? Tant que le Hezbollah ne désarme pas, ils ne lâcheront rien. La « Résistance » à Israël reste un symbole fort pour la communauté chiite, mais je me demande si cette vision survivra à cette guerre. Si le Liban survivra à cette guerre. Si ma santé mentale survivra à cette guerre. 

Pour l’instant, je n’ai aucun signe que cela se terminera bientôt. Israël est déterminé à affaiblir le Hezbollah, avec l’appui des États-Unis, tandis que l’Iran ne semble pas prêt à perdre cette carte stratégique.

Et le drone lui continue sa promenade sur nos têtes. Le jour ou il va s'éteindre pour de bon, on va subir un grand vide sonore. 

Josyane Boulos. 


-----

10-10-24

Israel has just bombed the heart of Beirut. Basta and Ras el Nabeh. Two minutes from Théâtre Monnot—my workplace. A densely populated neighborhood. It seems an entire building has collapsed. And this, without a prior evacuation order from Avichay Adraee. I think I’ve understood their strategy: When there's an order, they bomb a weapons depot. When they don’t, they’re targeting a specific individual.

Today, I can’t help but wonder: how much longer will this war last? Some say a few months, others talk of years. A civil war? I don’t really believe it. The Lebanese have neither the will nor the energy for that. Yet, the atmosphere is tense, and these prolonged tensions could very well escalate... We have to stay vigilant, work towards unity, and forget the hatred to come closer to one another. I often think about what we could do to prevent this. Maybe it’s time to acknowledge that no one has won in our past wars. We’re all losers. We need a fresh start, a real one, with a functioning political system and a state worthy of the name. But talking about it is so much easier than actually doing it.

And Israel? It’s strange. Despite all the violations of international law, no one seems to react. I think Europe is still haunted by the trauma of the Holocaust, and for the West, Israel remains an indispensable ally in this unstable region. Plus, they’ve built such strong influence networks that they’re untouchable. Two days ago, there was an image on Facebook of a graffiti in Berlin that said, "Stop making Palestine pay for Germany's guilt."

In Lebanon, it’s confusion. We talk about the implementation of Resolutions 1701 and 1559, but it’s far from enough. Our political class is completely overwhelmed, aware of its limitations. The presidential election remains blocked, and even with U.S. pressure, I struggle to see how we’ll get out of this stalemate.

The Arab countries? Silent. I’m not surprised. As long as Israel’s main target is Hezbollah, they won’t intervene. Hezbollah, by the way, has adjusted its discourse, no longer linking a ceasefire in Lebanon to the end of the fighting in Gaza. But honestly, that doesn’t change much for now.

Is everything up to Israel? Are they the only ones who will decide when this war ends? As long as Hezbollah doesn’t disarm, Israel won’t back down. The “Resistance” against Israel remains a powerful symbol for the Shiite community, but I wonder if this vision will survive the war. If Lebanon will survive the war. If my mental health will survive the war.

For now, I see no signs that this will end soon. Israel is determined to weaken Hezbollah, with the backing of the U.S., while Iran doesn’t seem ready to give up such a strategic card.

And the drone continues its stroll over our heads. The day it finally stops for good, we’ll be left with a great, empty silence.

Josyane Boulos.


mercredi 9 octobre 2024

Journal de Guerre 09 -10- 2024

 

Photo AFP

(AI english translation below) 

09 Octobre 2024 

Elle continue la guerre. 368 jours à Gaza, 367 au Sud Liban, 17 à Beyrouth. 

Le pire, c’est qu’on va s’adapter. Je le sens chez mes amis. “Aujourd’hui, je vais me remettre à cuisiner.” “Je vais recommencer à faire des bijoux.” “L’école a repris.” Comme lors des moments les plus sombres de la guerre dite civile, on enfilait nos baskets pour courir dans la rue, échapper aux balles des franc-tireurs, et on gardait nos talons dans la voiture pour aller danser… Plus on s’adapte, plus ça les énerve, ceux d’en face, et plus ils vont bombarder. Notre “gouvernement” pensera : “Regarde, ils vont bien.” Les mafieux continueront à se remplir les poches.

Efforts et pressions pour épargner l'aéroport… parce que le Vampire Bibi risque de le détruire. On le dérange, nous, avec notre résistance, notre obstination à rester debout. Depuis des décennies, on les emmerde. Peut-être qu’il a eu une maîtresse chiite qui l’a tellement fait souffrir qu’il veut maintenant tout détruire.

Je continue de faire de la propagande pro-Liban avec mes amis à l’étranger. Je les pousse à parler de nous, constamment. Et puis il y a Bibi Netanyahu (sérieusement, qui lui a donné ce surnom ? Bibi, c’est doux !), qui, dans un court discours, nous intime de “nous débarrasser du Hezbollah ou de voir le Liban réduit en poussière.” Tranquillou. Ça ne gêne personne. Le monde se tait, le monde continue. Mais bonnes gens, la Seconde Guerre mondiale c’était il y a moins de 100 ans. Vous n’avez rien appris ? 

Je pense qu’à force de jouer à des jeux vidéo violents, les nouvelles générations pensent que la guerre est dérisoire. Attendez qu’elle arrive chez vous, on en reparlera.

Le Liban propose de construire des villages de préfabriqués pour les déplacés. Pourquoi ne pas proposer un plan de paix pour qu’ils reviennent chez eux ? Arrêtons d’improviser. Si le gouvernement libanais est incapable de trouver de vraies solutions, qu’il se barre. Une fois pour toutes.

Mikati déclare que les efforts se poursuivent pour un cessez-le-feu “d’une durée limitée.” Pourquoi limitée, Habibi ? Comme au temps du confinement ? Les jours pairs, on fait la guerre, les jours impairs, on cesse le feu ?

D’ailleurs, vous vous souvenez des grandes révélations pendant le confinement ? Relations sociales, travail, inégalités… Le Covid a tout chamboulé. Il nous a aussi rappelé à quel point la solidarité devait être au cœur de nos vies. Solidarité envers qui ? Juste envers celui qui te ressemble ? La fameuse crise existentielle dont on parle tant en philosophie, nous, c’est tous les jours, depuis toujours. Malheureusement, en Occident, cette prise de conscience n’a pas duré longtemps.

Ah, au fait, le drone n’a pas quitté notre ciel. Je me demande sur quoi il fonctionne. Ce serait bien d’utiliser cette technologie pour alimenter l’électricité inexistante du Liban.


Bonne nuit.

Josyane Boulos 


---------- 

And the war continues : 368 days in Gaza, 367 in South Lebanon, 17 in Beirut. 

The worst part is, we’re going to adapt. I can feel it in my friends. "Today, I’m going to start cooking again." "I’ll get back to making jewelry." "School has resumed." Just like in the darkest moments of the so-called civil war, when we’d put on our sneakers to run across the street, dodging snipers’ bullets, and kept our heels in the car to go dancing... The more we adapt, the more it will irritate those on the other side, and the more they’ll bomb us. Our "government" will think, "Look, they’re doing fine." And the mafia will keep lining their pockets.

Efforts and pressure to spare the airport… because Vampire Bibi might destroy it. We bother him with our resistance, our determination to keep standing. We’ve been a thorn in their side for decades. Maybe he had a Shiite mistress who hurt him so much that he now wants to destroy everything.

I keep doing pro-Lebanon propaganda with my friends abroad. I push them to keep talking about us. And then there’s Bibi Netanyahu (seriously, who gave him that nickname? Bibi sounds so gentle!), who, in a brief speech, orders us to "get rid of Hezbollah or watch Lebanon be reduced to dust." Casually. No one’s bothered. The world remains silent, and life goes on. But good people, World War II was less than 100 years ago. Did you learn nothing?

I think that after playing violent video games for so long, new generations really believe war is trivial. Just wait until it comes to your doorstep, and then let’s talk...

Lebanon is proposing the construction of prefab villages for displaced people. Why not propose a peace plan so they can return home? Let’s stop improvising. If the Lebanese government is incapable of finding real solutions, let them leave. Once and for all.


Mikati says that efforts are ongoing for a "limited" ceasefire. Why limited, Habibi? What does that even mean? Like during the lockdown? On even days, we wage war; on odd days, we cease fire?

Speaking of lockdowns, remember the grand philosophical and human revelations we had? Social relations, work, inequalities… Covid shook everything up. It also reminded us how much solidarity should be at the heart of our lives. Solidarity with whom, though? Just those who look like you? That famous existential crisis we hear so much about in philosophy... for us, it’s every day, and has been for as long as we can remember. Unfortunately, in the West, that awareness didn’t last long.

Oh, by the way, the drone hasn’t left our sky. I wonder what powers it. It would be nice to use that technology for Lebanon’s nonexistent electricity.

Good night.

Josyane Boulos

mardi 8 octobre 2024

Journal de guerre 08 -10 - 24

 


 (AI English Translation below) 

08 octobre 2024

C’est bizarre. Il y a plus de moustiques maintenant qu’en plein été. J’aurais pensé qu’avec tout ce phosphore et l’uranium appauvri ils auraient été éradiqués.

La nuit a été calme à Beyrouth à partir de 11 heures. Bizarre aussi…

Ce matin photos passeport pour le visa Schengen. Puis direction le théâtre. Ça fait du bien d’être au bureau même si on prétend travailler.

Nous avons accueilli les enfants des familles soudanaises qui ont fui le Sud pour se réfugier chez les jésuites. Coloriage, goûter, bonne humeur des enfants. Aidez son prochain reste encore le meilleur remède contre la déprime. J’espère pouvoir la semaine leur organiser un petit spectacle de cirque.

Jacques Maroun, le célèbre metteur en scène et ami est passé au Monnot et nous avons discuté de possibilités d’offrir des activités gratuites aux voisins du Monnot, aux spectateurs de la région. Affaire à suivre.

Donc pendant près de 4 heures je n’ai pas ouvert les réseaux sociaux ni le journal. Je n’ai même pas entendu ce maudit Drone MK de surveillance qui rugit non-stop sur nos têtes. Je n’ose même pas penser à ce qui va arriver ce soir.

De retour à la maison je mets de la musique à haut volume pour cacher le bruit de cet engin diabolique. Je suis persuadé que les Israéliens utilisent exprès un drone sonore pour mettre nos nerfs à bout. Ils en ont sûrement des silencieux. Fils de merde de cafards.

J’ouvre l’Orient et je tombe sur ça : Naïm Kassem : Priorité au cessez-le-feu, le reste n'est qu'un détail. Le secrétaire général adjoint du Hezbollah a soutenu les efforts de Nabih Berry pour obtenir une solution diplomatique, mais remet la présidentielle à plus tard.

Parce que la présidentielle est un détail ? Deux ans sans président, deux ans sans gouvernement. Aucun Capitaine à la tête du navire. Les mêmes qui veulent nous sauver alors qu’ils nous ont noyé. Dégagez Bon sang. Je n’ai plus d’insultes à mon vocabulaire. Cette guerre les libanais N’EN VEULENT PAS. Alors Basta, Khalas, Finito, Finish, Fini !

Et éteignez le drone en sortant.

Bonne nuit.

Josyane Boulos 

---------- 

It's strange. There are more mosquitoes now than in the middle of summer. I would have thought with all this phosphorus and depleted uranium, they would’ve been wiped out.**

The night was calm in Beirut after 11 PM. Strange, too…

This morning, passport photos for the Schengen visa, then off to the theater. It feels good to be at the office, even if we’re only pretending to work.

We welcomed the children of Sudanese families who fled the South and took refuge with the Jesuits. Coloring, snacks, and the cheerful mood of the children. Helping others is still the best cure for depression. I hope to organize a little circus show for them next week.

Jacques Maroun, the famous director and friend, stopped by Le Monnot, and we discussed possibilities for offering free activities to our Monnot neighbors and local audiences. To be continued.

So for nearly four hours, I didn’t check social media or the news. I didn’t even hear that cursed MK surveillance drone that roars nonstop above our heads. I don’t even want to think about what will happen tonight.

Back home, I turn up the music to drown out the noise of that devilish machine. I’m convinced the Israelis are deliberately using a noisy drone to fray our nerves. They surely have silent ones. Sons of roaches.

I open L’Orient and come across this: "Naïm Kassem: Priority is the ceasefire, everything else is just a detail." The Deputy Secretary-General of Hezbollah supports Nabih Berry’s efforts for a diplomatic solution but delays the presidential election.

Because the presidency is just a detail? Two years without a president, two years without a government. No captain at the helm of the ship. The same ones who want to save us are the ones who drowned us. Get out, for God’s sake. I’ve run out of insults in my vocabulary. The Lebanese DO NOT WANT THIS WAR. So basta, khalas, finito, finish!

And turn off the drone on your way out.

Good night.

Josyane Boulos


Journal de Guerre 07-10-2024


 (AI English Translation below) 

07-10-2024

Les libanais sont tellement traumatisés, qu’ils ont l’impression qu’ils n’ont pas droit au bonheur.

L'odeur de poudre, de caoutchouc brûlé, de fumée est abominable. Le ciel est gris foncé de fumée. A tel point que ma fille m'a demandé à midi : Maman pourquoi le soleil se couche? 

7 octobre. Cette date restera toujours - et même après - pour moi l’anniversaire de mon aîné qui a aujourd’hui 35 ans. J’avais accouché à Courbevoie dans la banlieue parisienne. Pas par choix. Nous avions été au mariage de ma sœur en Alsace en Juillet. Au Liban la guerre (laquelle me diriez-vous ? Celle de la libération (ha-ha-ha) menée par Aoun contre les syriens.) Et, l’aéroport étant fermé et ma grossesse avancée, nous nous sommes retrouvés bloqués à Paris jusqu’à début novembre. Je refuse que dans ma mémoire personnelle elle soit synonyme du début d’encore une guerre.

C’est fou ce que l’être humain aime la guerre et aime s’entretuer. Je ne le comprendrais jamais. D’ailleurs c’est incompréhensible. La violence n’a jamais été la solution pour n’importe quoi. Je me suis souvent demandée, si au lendemain du massacre par le Hamas, le gouvernement Netanyahu avait compris qu’il fallait trouver une solution et entamer les processus de paix. Mais non… Malheureusement.

J’ai passé la journée à tourner en rond. J’étais assez déprimée je l’avoue. L’inaction me lasse et la réaction des médias occidentaux me dégoutent. Faire des deals avec les Iraniens sur le dos libanaise fait vomir. Donner un blanc-seing à Netanyahu est abominable.  J’ai entendu une idiote sur un post Instagram (un clip tiré d’une émission TV en France) dire que les palestiniens n’existent pas. Que c’est une invention. Jusqu’où ira cette propagande mensongère ? HALLUCINANT. Et jusqu’à quand le Hezbollah va continuer à mener le peuple libanais au suicide ? Pas avant les élections américaines me dit-on. Que de fois j’ai entendu cette phrase. Que de fois notre sort a semblé être tributaire des élections américaines… Quand apprendrons-nous à compter sur nous-mêmes ? quand serons-nous unis ?


La nuit ne va pas tarder. Et avec elle les ordres d’évacuation lancés par l’armée israélienne, l’armée la plus morale du monde (!). Vers 22h un mur du son. Je vais m’asseoir près de ma fille sur son lit (Valérie a 35 ans et elle est autiste). Elle me regarde de travers et me demande :

  • Qu’est-ce que tu fais la ?
  • Je suis venue voir si tu vas bien
  • Oui ce sont des feux d’artifices. Je vais dormir.

La puce essaye de se convaincre que c’est soit des feux d’artifices soit l’orage. Je lui avais expliqué que ce sont des bombes et la guerre mais elle préfère ignorer. Je la laisse faire. Si ça la repose, pourquoi changer les choses ? 


 Bonne nuit.


Josyane Boulos 


-----


The Lebanese are so traumatized that they feel like they don’t deserve happiness.

The smell of gunpowder, burning rubber, and smoke is unbearable. The sky is dark gray with smoke. To the point that my daughter asked me at noon: "Mom, why is the sun setting?"

October 7th. This date will always—and even after—be, for me, my eldest son's birthday. He is 35 today. I gave birth in Courbevoie, in the suburbs of Paris. Not by choice. We had gone to my sister’s wedding in Alsace in July. In Lebanon, the war was raging (which one, you may ask? The so-called Liberation War led by Aoun against the Syrians). And, with the airport closed and my pregnancy advanced, we found ourselves stuck in Paris until early November. I refuse to let this date in my personal memory become synonymous with the start of yet another war.

It's crazy how humans seem to love war and killing each other. I will never understand it. Actually, it’s incomprehensible. Violence has never been the solution to anything. I often wonder, if after the Hamas massacre, Netanyahu’s government had realized that a solution was needed and began peace talks. But no… sadly, they didn’t.

I spent the day pacing around. I was pretty depressed, I admit. The inaction tires me, and the reaction from Western media disgusts me. Making deals with the Iranians at Lebanon’s expense is sickening. Giving Netanyahu a blank check is atrocious. I heard some idiot on an Instagram post (a clip from a French TV show) saying that Palestinians don’t exist. That it’s a fabrication. How far will this false propaganda go? UNBELIEVABLE. And how long will Hezbollah continue to lead the Lebanese people to suicide? Not before the U.S. elections, they say. I’ve heard that phrase so many times. How often has our fate seemed tied to American elections? When will we learn to rely on ourselves? When will we be united?

Night is approaching. And with it, the evacuation orders from the Israeli army—the most moral army in the world (!). Around 10 PM, there’s a sonic boom. I sit next to my daughter on her bed (Valérie is 35, and she’s autistic). She gives me a sideways glance and asks:

“What are you doing here?”

“I came to check if you’re okay.”

“Yes, those are fireworks. I’m going to sleep.”

My little one is trying to convince herself that it’s either fireworks or a thunderstorm. I had explained to her that these are bombs, that this is war, but she prefers to ignore it. I let her. If it gives her peace, why change things? Good night.

Josyane Boulos

lundi 7 octobre 2024

JOURNAL DE GUERRE 06 -10-2024


 

(AI English translation Below) 

Le quotidien à Beyrouth est devenu un cauchemar depuis le début des frappes israéliennes. Cela fait  huit jours (comme une année) que la guerre totale a englouti le Liban, avec plus de 9 100 attaques israéliennes à travers le pays depuis le 8 octobre 2023.

Depuis le lundi 22 octobre, la vie dans la capitale est devenue insupportable. Les bombardements touchent principalement la banlieue sud de Beyrouth, à seulement 600-800 mètres de chez moi à vol d’oiseau.  Et le drone de surveillance israelien bourdonne sans arrêt dans notre ciel. 

Chaque nuit est marquée par des frappes aériennes qui commencent aux alentours de minuit pour se poursuivre jusqu'à 3h30 du matin. Sur X (anciennement Twitter), le porte-parole de l'armée israélienne publie des messages avertissant les habitants de certains immeubles d'évacuer immédiatement, car les bombardements sont imminents. Les familles fuient en pleine nuit, souvent en pyjama, ne sachant pas où aller, emportant ce qu'elles peuvent dans un désespoir absolu.

Ce qui est particulièrement déchirant, c'est que ces frappes visent généralement des dépôts d'armes, placés en plein milieu des habitations civiles par le Hezbollah. Cela souligne une triste réalité : les gouvernements successifs du Liban depuis 2004 n'ont jamais réellement pris en compte les intérêts de notre population.

Chaque matin, nous comptons les morts, les blessés, et les immeubles détruits, que ce soit à Beyrouth, dans la montagne, à la Bekaa ou au Sud. Le présent est si lourd que je n'arrive même plus à penser à l'avenir. Mon esprit est comme figé dans une brume anesthésiante. Je ne fais rien, je lis, je suis les nouvelles, je dors par moments pour rattraper les nuits sans sommeil. De temps en temps, des amis passent et on partage une bouteille en se donnant du courage.

Je tente de mobiliser mes amis à l’étranger pour qu’ils parlent du Liban, car nous savons que bientôt, comme toujours, nous ne serons plus qu’un fait divers dans les médias internationaux. Seuls les réseaux sociaux continueront à relayer notre réalité, mais même là, la diffusion de nos posts diminue de manière inquiétante. Avant, j'avais facilement un minimum de 200 likes sur mes publications, aujourd'hui, je n'en reçois que 10 ou 20.

C’est un sentiment étrange, d’observer le monde continuer comme si de rien n'était, tandis que notre avenir semble inexistant.


Josyane Boulos.


Daily Life in Beirut Has Become a Nightmare


Since the beginning of Israeli strikes, life in Beirut has turned into a nightmare. It’s been eight days (feeling like a year) since total war engulfed Lebanon, with over 9,100 Israeli attacks across the country since October 8, 2023.

Since Monday, October 22, life in the capital has become unbearable. The bombings are primarily hitting the southern suburbs of Beirut, just 600-800 meters away from my home, as the crow flies. And the incessant buzzing of Israeli surveillance drones haunts our skies.

Every night is marked by airstrikes, beginning around midnight and lasting until 3:30 AM. On X (formerly Twitter), the Israeli army spokesperson sends messages warning residents of certain buildings to evacuate immediately, as bombings are imminent. Families flee into the night, often in pajamas, not knowing where to go, carrying whatever they can in absolute despair.

What is particularly heartbreaking is that these strikes often target weapons depots placed right in the middle of civilian areas by Hezbollah. This highlights a grim reality: Lebanon's successive governments since 2004 have never truly considered the well-being of our population.

Every morning, we tally the dead, the injured, and the destroyed buildings—whether in Beirut, the mountains, the Bekaa Valley, or the South. The present is so heavy that I can’t even think about the future. My mind feels frozen in an anesthetizing fog. I do nothing but read, follow the news, and sleep occasionally to make up for sleepless nights. Sometimes friends come over, and we share a bottle of wine, trying to muster up some courage.

I’m trying to mobilize my friends abroad to speak up about Lebanon, because we know that soon, as always, we’ll become just another footnote in international news. Only social media will continue to tell our reality, but even there, the reach of our posts is alarmingly declining. Before, I’d easily get at least 200 likes on my posts—today, I barely receive 10 or 20.

It’s a strange feeling, watching the world move on as if nothing is happening, while our future seems nonexistent.

Josyane Boulos