samedi 19 octobre 2024

Journal de Guerre 19 octobre 2024



(AI English translation below) 

Je suis allongée paisiblement sur mon canapé, sur ce balcon que j’aime tant. C’est mon refuge, mon coin de sérénité où j’ai pris plaisir à aménager plantes et meubles. Le doux soleil d’automne m’enveloppe tandis que je dévore mon dixième livre depuis le début de la guerre totale le 23 septembre. Le chat, détendu, s’étire sur la table. Une scène idyllique … ne serait ce le bruit incessant d’un drone israélien, assourdissant. Ne serait-ce que ce matin, l’aviation israélienne a bombardé Sahel Alma. « Une première » disent-ils dans les journaux. Pour moi, une première, c’est l’ouverture d’un rideau, une standing ovation et du champagne pour fêter ça… pas un bombardement. 

 Ce cher AA, envoie un ordre d’évacuation d’un quartier de Haret Hreik. Ma fille Valerie (autiste de 33 ans) sort au balcon me demander si elle peut prendre un gâteau au chocolat. Elle prend le chat dans ses bras.

 Une très forte déflagration. Je sursaute. Mais surtout je garde mon sang froid. Surtout ne pas lui faire peur. Ne pas nourrir la peur de ma fille. Je regarde l’immeuble d’en face. Tout comme moi, mon voisin a simplement un regard vers le ciel et reprend la lecture sur son cellulaire. 

Valérie me demande et se répond : c’est quoi maman? Les voisins on claqué une porte? 

Je n’ai pas le temps de lui répondre qu’elle crie du balcon : « He ho les voisins ne claquez pas la porte. » Son déni à elle. 

Puis-je lui reprocher de se protéger ? 

Je fais de même : « hé ho les voisins attention aux portes » puis je lui dis « bien sûr tu peux prendre un gâteau au chocolat ma chérie. » 

 Nos enfants n’ont pas à revivre nos horreurs … nos erreurs. Et je les maudis tous : le gouvernement israélien barbare, le Hezbollah qui nous entraîne dans une guerre que nous ne voulons pas, l’Iran qui mène ses batailles jusqu’au dernier Libanais, le monde qui regarde déshumanisé et silencieux, les gouvernements occidentaux qui continuent à fabriquer et à livrer des armes, nos dirigeants successifs qui depuis des décennies laissent faire, insouciants du bien-être de leur peuple et nous, ce peuple qui, à force de tolérer l’inadmissible, en a fait la norme, acceptant qu’un pays étranger décide de la paix ou de la guerre chez nous en criant bel rou7 bel dam nafdika … » remplacez les 3 points par le nom de votre Zaïm préféré. 

 Je regarde Valerie savourer son gâteau, le chat, sourd comme un pot, se rendort, mes plantes se balancent doucement, indifférentes. Me sentant inutile, impuissante, je reprends ma lecture sous ce soleil qui continue à briller, sur le nord, le sud, la Bekaa, sur Israel et sur Gaza.

Josyane Boulos 

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I'm peacefully lying on my couch on this balcony that I love so much. It’s my refuge, my corner of serenity where I’ve enjoyed arranging plants and furniture. The gentle autumn sun envelops me as I devour my tenth book since the total war began on September 23. The cat, equally relaxed, stretches out on the table. An idyllic scene… if it weren’t for the incessant, deafening noise of an Israeli drone. Just this morning, the Israeli air force bombed Sahel Alma. “A first,” they say in the newspapers. For me, a first is the opening of a curtain, a standing ovation, and champagne to celebrate… not a bombing.

Dear AA sends an evacuation order for a neighborhood in Haret Hreik. My daughter Valerie (Autistic) comes out onto the balcony to ask if she can have a chocolate cake. She picks up the cat in her arms. A loud explosion. I jump. But above all, I keep my composure. I must not scare her. I must not feed my daughter's fear. I look at the building across from me. Like me, my neighbor simply gazes at the sky and resumes reading on his cellphone. Valerie asks me and answers herself: “What is it, mom? Did the neighbors slam a door?” I don’t have time to respond before she shouts from the balcony: “Hey, neighbors, don’t slam the door.” Her own denial. Can I blame her for wanting to protect herself? I do the same: “Hey, neighbors, watch out for the doors,” then I tell her, “Of course, you can have a chocolate cake, my dear.”

Our children shouldn’t have to relive our horrors… our errors.

And I curse them all: the barbaric Israeli government, Hezbollah dragging us into a war we don’t want, Iran fighting its battles to the last Lebanese, the world looking on, dehumanized and silent, the Western governments that continue to manufacture and deliver weapons, our successive leaders who have been indifferent for decades to the well-being of their people, and us, this people that, by tolerating the unacceptable, has made it the norm, accepting that a foreign country decides on peace or war in our land while shouting “bel rou7 bel dam nafdika…” replace the three dots with the name of your favorite Zaïm.

I watch Valerie savor her cake, the cat, deaf as a stone, falls back asleep, my plants sway gently, indifferent. Feeling useless, powerless, I return to my reading under this sun that continues to shine, over the north, the south, the Bekaa, over Israel and Gaza.


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